Musique et situation de handicap

Aujourd’hui, je souhaiterais vous parler d’un sujet qui me tient à cœur, pour différentes raisons que je n’exposerai pas ici. Je vous laisse découvrir ce petit reportage réalisé durant la formation « Les fondamentaux de la pédagogie musicale adaptée », ainsi qu’à Musicora, le salon de la musique au cours duquel j’ai également rencontré différents acteurs de l’accessibilité de la musique à tous. Ce fut également l’occasion de découvrir des instruments tout à fait étonnants, pas seulement parce qu’ils sont adaptés à tous les publics, mais aussi par l’inventivité de leurs créateurs.

Transcription de la vidéo

Suzanne Estève-Dijoux, musicienne et pédagogue, formatrice à l’association MESH, Musique Et Situation De Handicap

MESH est une association qui existe depuis 1982. MESH veut dire « musique et situation de handicap », et elle milite, cette association, pour l’accessibilité des personnes en situation de handicap à la musique, à l’apprentissage musical. Voici la présentation de MESH en trois pôles : le premier pôle : pôle « recherche action », où nous avons déjà travaillé sur un Vademecum pour les directeurs et même pour n’importe quel professionnel qui souhaite accueillir au mieux des publics, des personnes, des élèves en situation de handicap au sein de leurs structures : dans des conservatoires, écoles de musique, etc. Ce sont plein de questions et on fournit plein de réponses concrètes pour favoriser l’accessibilité, que ce soit l’accessibilité du cadre bâti ou même du cadre donc de la pédagogie, plus particulièrement du référent handicap : est-ce qu’il en faut un ? Comment faire de la musique ? Voilà, n’importe quelle question : la musique avec un élève handicapé moteur, il veut faire les percussions, est ce que c’est possible ? Des choses comme ça qui, concrètement, de façon très pragmatique, puissent apporter des réponses à tout professionnel désireux d’apprendre la musique pour ces personnes-là. Ensuite on a un pôle de formation, et un autre pôle auquel on peut téléphoner à MESH qui se trouve dans le 95, dans département du Val d’Oise et si on a des questions : par exemple on est étudiant, on fait un master sur le handicap, n’importe quelle question… En étant aussi papa, maman d’un enfant en situation de handicap qui veut l’inscrire en école de musique, et à côté de chez eux il n’y a pas grand-chose, donc MESH peut donner des des pistes ou, justement, se mettre en lien avec le conservatoire qui est le plus proche de la de la famille, et voir ce qui est possible d’être fait : un partenariat, former le personnel de ce conservatoire là, ou alors nous avons donc dans le 95 uniquement, des ateliers de musique, des « ateliers tremplin », qui ne sont pas là pour être pérens, mais qui peuvent être repris par le conservatoire, par l’école de musique. Voilà MESH ce que c’est.

Que se passe-t-il du côté des écoles de musique et conservatoires ?

Catherine Baubin, Association des Conservatoire de France :

[En ce qui concerne] les activités qui sont mises en place, les actions que mènent les conservatoires dans le domaine du handicap, il y a trois grandes directions : il y a d’une part créer, mettre en place des activités spécifiques qui petit à petit devient aussi des activités mixtes, parce qu’une des questions qui se posent c’est « comment faire pour que ces activités ne soient pas des ghettos pour les personnes en situation de handicap ? » et donc on voit de plus en plus se développer les questions qui se posent aussi dans dans les réseaux, par exemple : « comment on peut mélanger des élèves handicapés et des élèves dits « valides » ? »

Deuxième direction : c’est bien évidemment accueillir des élèves en situation de handicap dans les activités je dirais « habituelles », « normales » (enfin je ne sais pas comment il faut dire) du conservatoire et avec toutes les questions que ça que ça amène de se poser la question « mais qu’est ce que c’est que la norme ? » et de réinterroger notre rapport à la norme. On a parlé d’accueil, on a parlé d’adaptation des cursus, on a parlé d’adaptation des cours, on a parlé de micro-pédagogie… Tous ces termes-là finalement, c’est parce que c’est souvent à l’occasion de l’accueil d’élèves en situation de handicap qu’on se les pose, mais ce sont des questions qu’on devrait se poser pour tous les élèves ! « Comment on accueille un élève ? Comment on discute avec sa famille ? Comment on comprend ce dont il a besoin et comment on comprend son projet ? » Normalement ça devrait être la norme pour tout le monde et donc c’est plus par cette interrogation que ça nous apporte, que ça nous amène à poser, que le sujet est intéressant.

Troisième direction aussi, c’est le partenariat avec des structures spécialisées et notamment, pour avoir connu cette expérience-là à Rezé dans l’établissement que je dirigeais jusqu’au mois dernier, ce sont des élèves qui ne viendront jamais à l’école de musique et de danse parce qu’ils sont très fortement handicapés ou très fortement appareillés et que c’est très compliqué ou que parce que leurs familles habitent très loin, qu’ils sont internes dans une structure spécialisée donc c’est aussi comment on travaille avec cette structure spécialisée et comment on développe un partenariat où, du coup, on peut travailler aussi avec les éducateurs spécialisés, avec les soignants, avec avec toute l’équipe qui entoure le jeune et ça permet effectivement d’explorer d’autres façons de faire.

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Présentation de quelques instruments adaptés aux musiciens ayant des « besoins spécifiques »

Frédéric Bousquet (facteur, pédagogue, chercheur), « Titanium Sound Education »

« Dans le cadre des personnes à besoins spécifiques, il y a eu plusieurs démarches en effet ont coexsité : MESH avec Magali Viallefond, ont eu cette démarche pionnière de dire « que peut-on peut donner comme corps sonores à nos pratiquants, dont les gestuelles sont très spécifiques, pour qu’ils développent une expression musicale ? » Il est est vrai que nous avons trouvé des limites. Par exemple, les gens qui sont en fauteuil, il est souvent nécessaire de porter les corps sonores. Donc en 2008, accueillant MESH, nous étions ici présents à Musicora. L’idée c’était de présenter des systèmes de support : comment on peut avoir des tables qui se lèvent en hauteur ? comment on peut avoir des systèmes qui permettent une accessibilité au jeu, sans forcément la présence d’un éducateur spécialisé qui va devoir soutenir un instrument ? Avec la création de cette nouvelle gamme d’instruments les LUDOPHONES, nous tentons de répondre à plusieurs contraintes : l’accessibilité à l’objet, en développant des tables-supports fabriquées par des spécialistes, la société HEPHAÏTOS est le numéro 1 français du mobilier ergonomique. Nous avons créé du mobilier sonore avec des petites spécificités pour que l’on puisse poser des claviers directement dessus, les orienter, etc.

La deuxième chose qui nous est apparue fondamentale, c’est que, les pratiquants puissent jouer depuis l’éveil jusqu’à la pratique musicale, en abordant aussi la mélodie, la notation. Les ludophones sont des instruments accordés. selon le mode harmonique naturel du son.

Quand tout le monde joue ensemble et découvre l’instrumentarium, nous ressentons immédiatement une sensation déjà harmonieuse, d’euphonie, engageant des jeux mélodiques. On peut aussi jouer de la musique modale ou tempérée avec des instrumentistes. Il nous a paru essentiel que les ludophones forment un outil ouvert au dialogue avec des musiciens professionnels, depuis l’éveil au monde des sons, vers la pratique et l’interprétation. »

Pour en savoir plus : www.ludophones.com

Georges Alloro, facteur d’instruments, « Résonances Nomades »

Cet instrument s’appelle le Kotar. C’est un instrument que j’ai construit il y a longtemps, il y a une trentaine d’années. C’est un instrument qui sera modifié pour les handicapés. C’est une harpe à 15 cordes.

C’est un instrument de percussion à côté que vous voyez. C’est un instrument que j’ai construit exprès pour un handicapé, afin qu’il puisse venir en fauteuil devant. On peut régler le son par ces petites mécaniques sur le côté, et le son est double puisque la peau est ovale.

C’est un instrument de percussion avec une membrane unique qui est pré-tendue, on appelle ça pre-tuned, qui est accordée à l’avance, et l’instrument est construit sur la peau qui est tendue. Ça permet d’avoir des sons différents, parce qu’il y a 9 alvéoles, ce qui permet d’avoir des sons de différents suivant la grosseur de la peau.

L’inventivité que j’ai permet de mettre au point des systèmes électromécaniques pour les tétraplégiques avec le mouvement de la langue, et je travaille là-dessus. D’ici un an ou deux, j’aurai des résultats. Je mets ma créativité au service des handicapés.

Pour en savoir plus : Résonances Nomades et le site de Georges Alloro

La pédagogie doit-elle également être adaptée à ces publics ?

« Suzanne Estève-Dijoux : On dirait que « pédagogie adaptée », c’est un pléonasme, je dis bien que c’est un pléonasme en fait, parce que la pédagogie, elle doit être adaptée à l’élève que nous avons face à nous. Donc vive la musique pour tous ! »

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Ajout du 20/01/2022 :

Pour aller plus loin, je vous recommande cette vidéo de L’Instrumentarium de l’Insolite :

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