La Méthode Jaëll-Montessori

Vous connaissez Maria Montessori, mais connaissez-vous Marie Jaëll ?

Si tout le monde aujourd’hui ou presque, a déjà entendu parler de Maria Montessori et de sa pédagogie, peu de gens, y compris chez les musiciens, connaissent Marie Jaëll et son art du toucher.

Les deux femmes ont pourtant bien des points communs, ne serait-ce que le fait d’être des pédagogues du début du XXème siècle qui se sont toutes deux intéressées aux rouages des apprentissages. Marie-Jaëll, pianiste virtuose, a cherché toute sa vie à retrouver le toucher de Liszt dont elle était la secrétaire. C’est Marie-Charlette Benoît, qui avait reçu à la fois les enseignements de Marie Jaëll et de Maria Montessori, qui a réuni les approches des deux femmes pour en faire une méthode pédagogique basée sur le respect du rythme de l’enfant et sur l’éducation du geste musical.

En quoi consiste la méthode Jaëll-Montessori ?

Pour le découvrir, je suis partie à la rencontre de Marie-Charlotte Avril Brun qui m’a chaleureusement accueillie dans son école « Grandir en Musique » près de Toulouse, où elle propose notamment des cours d’éveil musical suivant les enseignements de Maria Montessori et Marie Jaëll.

Dans cette vidéo, elle vous présente cette pédagogie et ses origines et propose deux jeux musicaux très simples que vous pouvez réaliser avec vos enfants sans investir dans du matériel coûteux

Pour aller plus loin

Si cette pédagogie vous intéresse et que vous souhaitez voir la vidéo complète avec d’autres ressources pour accompagner vos enfants, je vous invite à cliquer sur la bannière ci-dessous pour en savoir plus sur la formation en ligne destinée aux parents soucieux d’accompagner leur petit musicien :

Transcription du texte de la vidéo

« Je m’appelle Marie-Charlotte Avril et je suis professeure d’éveil musical – nous on dit initiation musicale, tous les enfants sont éveillés, on les initie plutôt – en pédagogie Jaëll-Montessori.

Comme son nom l’indique, elle a été inspirée de la pensée de deux femmes assez exceptionnelles, chacune dans leur siècle : Marie Jaëll, qui a été la secrétaire de Liszt. C’était une enfant prodige. Elle a d’abord été concertiste. Et puis elle a été fascinée par le jeu de Liszt dont elle a été la secrétaire et après avoir été concertiste très tôt, elle s’est complètement arrêtée et elle a consacré tout le reste de sa vie à l’étude du toucher du piano. Elle a inventé ce qu’on appelle la « méthode du toucher », l’art du toucher de Marie Jaëll » et elle a cherché comment reproduire le son qu’elle avait entendu chez Liszt, par tout un travail de la main et de la manière de toucher le piano.

Et puis Maria Montessori, elle est beaucoup plus connue, pédagogie du début du XXème siècle qui a beaucoup œuvré pour le développement de l’enfant, le libre choix dans ses écoles, qu’on appelle les écoles Montessori, où les enfants ont à leur disposition tout un matériel et peuvent apprendre – une fois que ce matériel leur a été présenté – peuvent apprendre par eux-mêmes. « Aide-moi à faire par moi-même ». On a longtemps dit « apprend-moi à faire tout seul », mais c’est dans l’idée « aide moi à faire par moi-même », c’est pas « débrouille-toi tout seul », mais c’est « par moi-même », à mon rythme et à ma mesure.

Et puis une femme, qui s’appelait Marie-Charlette Benoit, a eu la chance de faire un bac Montessori complet, ça se faisait à l’époque. Elle est morte assez récemment, c’était une dame du XXème siècle aussi. Et elle a reçu par sa mère l’héritage Jaëll (sa mère avait été une très proche élève de Marie Jaëll) et le bac Montessori. Et puis elle s’est rendue compte que ces deux femmes avaient des points communs, en tout cas que ces deux pédagogies appliquées à la musique pouvaient faire des merveilles avec les enfants. Et elle a mis en place sa pédagogie en isolant chaque paramètre musical, en créant des jeux musicaux adaptés aux tout-petits (3-6 ans) et puis aussi aux bébés, puisque son mari Pierre Benoit était psychanalyste, co-fondateur de la maison verte, donc très proche de Françoise Dolto. C’était un milieu de l’intelligentsia parisienne. Et Françoise Dolto avait demandé à Madame Benoit si elle pouvait mettre en place des moments musicaux, avec les parents, les enfants, pour aider aux premières séparations. Et ce sont nos moments musicaux, que nous continuons à pratiquer. Moi je travaille beaucoup en petite enfance aussi. Mais là aujourd’hui je voudrais vous parler de cette pédagogie Jaëll-Montessori, mise en place par madame Benoit, pour les 3-6 ans. L’héritage Jaëll, pour moi, c’est l’héritage de la main, qui va très bien avec tout ce qui est comptines et jeux de doigts. Donc évidemment, vous connaissez les moulins, les marionnettes. Nous on va aller sur des choses beaucoup plus fines qui vont faire travailler la pensée. La main, ça fonctionne avec l’intelligence. C’est ce que disent à la fois Marie Jaëll et Maria Montessori : quand l’enfant travaille sa main, quand l’enfant manipule, il y a des tas de synapses qui se connectent – on le sait maintenant avec les neurosciences – et il développe son intelligence. Vous avez vu vos tout-petits manipuler des choses, jouer : ils sont en train de se construire.

Deux exemples de jeux musicaux simples

L’intensité [abordée selon les principes de la pédagogie de] Maria Montessori :

• [Marie-Charlotte Avril montre une feuille bleue foncée] On joue très fort.
• [Elle montre une feuille bleue un peu plus claire] On joue moins fort.
• [Elle montre une feuille bleue claire] On joue beaucoup moins fort.

Il n’y a pas besoin de dire fortissimo, mezzoforte, pianissimo. Il n’y a pas besoin des mots, c’est vraiment la couleur, l’intensité de la couleur qui va donner l’intensité du son. C’est l’inter-sensorialité.

On a plein de jeux pour apprendre à jouer très fort, pour apprendre à jouer très doucement. C’est là aussi tout un travail moteur.

Le jeu de la bougie (jeu d’écoute)

Nous par exemple, avec les clochettes, un jeu fabuleux que tous les enfants aiment, tous les adultes aussi, qui est un jeu de durée d’ailleurs. On utilise les clochettes pour ça, mais c’est un des premiers jeux de durée, c’est le jeu de la bougie. Et vous pouvez le faire avec un couvercle de casserole, ou une belle cloche chez vous, n’importe quel instrument résonnant, un bol tibétain… puisqu’il s’agit d’écouter le son jusqu’au bout. Il faut être deux : il y en a un qui joue le son et un qui l’écoute. Moi je vais faire les deux. [elle fait tinter la clochette]. Et quand je n’entends plus le son de la cloche, [elle souffle] je souffle ma bougie. Un jeu d’écoute extraordinaire. Donc il faut un instrument avec un joli son, beaucoup d’harmoniques et avant de travailler l’instrument, ça peut être intéressant.

En conclusion

Si j’ai une chose à dire aux parents d’enfants musiciens, puisque c’est le propos de la formation de Céline, c’est d’être beaucoup dans l’observation des enfants. « Le Maître est l’Enfant », c’est le titre d’un film récent qui est très intéressant sur la pédagogie Montessori, que je vous invite vraiment à voir. Et pour moi, c’est ça : le maître, c’est l’enfant, donc en observant votre enfant, c’est lui qui va vous dire ce dont il a besoin. C’est le principe de la pédagogie Montessori. Et j’ai envie de vous dire observez-le et jouez, amusez-vous. Céline a déjà donné des tas de petits outils pour ça [dans la formation], jouez ensemble. Et aussi toujours de respecter le rythme de l’enfant. Ça c’est très important, que ça vienne de lui. Ça n’empêche pas qu’il y ait de la discipline, ça n’empêche pas qu’il y ait le travail de l’instrument parce qu’on ne peut pas passer à côté, mais de trouver comment le faire de manière ludique et surtout en respectant son rythme d’apprentissage, ça c’est très important. Voilà, s’il y a une chose à retenir, pour moi c’est ça. Et que chaque enfant est tellement différent ! On ne peut passer à côté de le regarder lui et de regarder comment il fonctionne lui par rapport à l’autre, son frère, sa sœur, son cousin, son petit copain… sans comparaison. »

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