Imaginez un instrument de musique qui serait comme « un bijou, un ornement pour le visage », qui vous permettrait également « d’apprendre la musique sans peine et sans maître », de reproduire à la perfection les sons du violoncelle ou du violon sans jamais avoir tenu un archet entre vos mains, et même – plus ambitieux – de ne « jamais être seul » ! Ce sont les promesses qu’un certain Abbé Varin faisait miroiter aux acquéreurs de son invention dans les années 1920.
Qu’est-ce que c’est que ce machin ?
Techniquement, ce n’est rien de plus qu’un mirliton, un cousin du kazoo. La varinette est constituée d’un cylindre en bois ou en galalithe (ou « pierre de lait », une des premières matières plastiques, fabriquée à partir de la caséine, la protéine du lait), munie d’un trou cylindrique où le « varinettiste » pose ses lèvres, ainsi que d’une fine membrane qui vibre lorsqu’on chante dans l’instrument.
Il s’agit donc d’un membranophone. Pour voir les membranes d’une varinette, il faut dévisser les deux bouchons latéraux (« cachez cette membrane que je ne saurais voir ! ») :
Ce qui est assez cocasse, c’est que les publicités de l’époque tentent d’en faire un objet de luxe et le qualifient de « Roi des instruments ». Certains modèles sont vendus comme des bijoux, ornés de pierreries et conservés précieusement dans des écrins. Je savais que j’allais vous faire rêver…
Quant à l’argument « vous n’aurez plus besoin d’un professeur de musique », tout d’abord permettez-moi de vous dire que vous ne vous débarrasserez pas si facilement que ça de nous 😉 Il semble en tout cas que ce soit un argument à la mode à cette époque, et ça l’est encore de nos jours, d’ailleurs.
En résumé, c’est un genre de mirliton à deux membranes enrobé de marketing, afin de le rendre un peu plus glamour que ce dernier. Pourtant c’est chou le mirliton, vous ne trouvez pas ?
Et le son ?
Malheureusement, impossible de trouver un enregistrement de l’instrument ! J’ai ouïe dire qu’on entendait une joueuse de varinette dans un des épisodes de l’émission « Le Petit Rapporteur » de Jacques Martin en 1975 ou 1976, mais je n’ai pas encore pu mettre la main sur cette vidéo. Si vous avez ça dans vos fonds de tiroirs (ou vos disques durs), faites-le moi savoir. En attendant, voici une vidéo de kazoo agrémentée de beatbox et de crotales (cymbalettes). Le son de la varinette ne doit pas être si différent que cela de celui du kazoo, étant donné que le principe est le même. Ce qui change c’est la forme de l’instrument, la façon de le tenir et le fait qu’il n’y ait qu’une seule membrane sur un kazoo au lieu de deux sur la varinette :
Quelle est son histoire ?
C’est en 1918 qu’un abbé français, Jean-Edouard Varin, donne son nom à cet instrument qu’il destine tout d’abord aux enfants des colonies de vacances.
Le journal « Le Petit Parisien » du 25 juin 1919 rapporte qu’une « curieuse audition de « varinette », instrument imitant le violoncelle […], a eu lieu hier [en] présence de la duchesse d’Uzès et de la marquise de Mac-Mahon, sur l’initiative de Mme la générale Pau. » On s’occupe comme on peut dans les manoirs !
Rapidement, l’Abbé Varin fait breveter son invention et souhaite en faire un concurrent de l’harmonica allemand. Comme celui-ci, sa simplicité et son prix abordable favorisent son succès. En 1923, il fait un tabac (en tout cas selon les dires des publicités de l’époque) au premier Salon de la Musique de la Foire de Paris. Mais à l’inverse de l’harmonica, l’engouement qu’il suscite sera de très courte durée. D’ailleurs, aviez-vous déjà entendu parler ce cet instrument auparavant ?
Fabriquer une varinette
L’abbé Varin n’étant plus là pour nous tirer les oreilles (« pas touche à mon invention ! »), je vous propose de fabriquer une version « récup » de la varinette. À vos ciseaux !
Pour en jouer, posez votre bouche sur le trou central et chantez n’importe quel air, cela devrait faire vibrer les feuilles de papier à cigarette, si celle-ci sont suffisamment tendues. Il faut donc faire attention de ne pas écraser l’instrument entre les doigts. Ça peut être une expérience intéressante pour apprendre la délicatesse de mouvements à un loustic…
Retrouvez les autres articles consacrés aux instruments dans cette rubrique et inscrivez-vous à la liste de diffusion pour ne rien manquer !
Recherches utilisées pour trouver cet article :https://la-musique-et-vous com/tag/varinette/
Passionnée de pédagogie musicale, je partage avec vous dans ce blog mes connaissances et expériences acquises au cours de mes activités de professeur de flûte, directrice d’école de musique, musicothérapeute et maman de deux loustics musiciens.
Bruno
Ça me donne envie d’avoir un kazoo!!!
corinne
Bonjour, on entend affectivement une joueuse de varinette dans le DVD spécial du » Petit rapporteur » (DVD 1, vers la fin). (Le café de la gaité, à beaucharmois, rubrique de Pierre Bonte, 56 ème minute).
Céline Dulac
Fabuleux ! Merci Corinne. Je savais que je pouvais compter sur mes lecteurs pour répondre à cette question cruciale 😉
En tout cas, j’ai hâte de voir ça !
JOSE CAMARGO
Por favor. Como posso adquirir MEMBRANA PARA VARINETTE ? Agradeço antecipadamente sua atenção.
São Paulo – Brasil
Céline Dulac
Bonjour Jose. Je ne sais pas quoi vous répondre, la varinette n’est plus un instrument fabriqué de nos jours. J’imagine qu’on peut utiliser un autre type de membrane à la place (papier à cigarettes par exemple ?)
Bonne recherche !
Dumè Gambini
J’ai toujours entendu dire que ce » système » était déjà utilisé au moyen âge et fonctionnait grâce à un morceau de canne et 2 pelures d’oignon.
Tante salute di Corsica
DG
PS: En Corse, c’est un « Cimbalettu » j’en ai fabriqué lorsque j’étais gamin
Sam de Siebenthal
http://nose-flute.blogspot.com/2013/01/the-oclariflute-oclariflute.html
L’ocariflute est différent de la varinette. C’est un petit instrument dans lequel il faut souffler par le nez, la cavité buccale servant pour la résonance. C’est une des nombreuses versions de la flûte de nez avec lequel on peut jouer moult mélodies. Le son ressemble à celui d’une flûte. Cela reste un appeau à son origine.